Les Maires de Rueil sous l’Empire et la Restauration

Eglise Saint-Pierre Saint-Paul de Rueil

Avec le Consulat, Rueil récupère son autonomie municipale… sous l’autorité du Préfet. Car les maires du Consulat puis de l’Empire, seront des fonctionnaires qui prêtent serment. Le suffrage universel est rétabli mais n’a rien de démocratique puisque les citoyens doivent voter pour des « listes de notabilités » parmi lesquels le pouvoir choisira le maire et les conseillers municipaux.

Mandat Denis François Debourges (1800-1813)

C’est dans ce contexte qu’est nommé élu le 3 décembre 1800 Denis François Debourges, greffier de son état et déjà agent municipal sous le Directoire ; il sera plusieurs fois reconduit. A cette époque, l’administration municipale est des plus dépouillée : un tambour et un afficheur pour informer la population, un garçon de bureau, un juge, un greffier, un secrétaire de mairie et un garde champêtre. Le village est pauvre malgré la présence de grands personnages de l’Empire (Joséphine bien sûr au domaine de la Malmaison, mais aussi, le Maréchal Massena qui a racheté le domaine qui a appartenu à Richelieu) : c’est un village de paysans surtout préoccupés de protéger les récoltes.

L’administration municipale a également à sa charge l’éducation des enfants et l’organisation de la conscription. En 1808, la municipalité bénéficie d’une aide inattendue : à sa mort, Mlle Julien, propriétaire du domaine de Bois-Préau a légué une somme d’argent importante à la commission de bienfaisance. 

Mandat Léonard Bertin (1813-1822)

En 1813, suite au renouvellement de la moitié du conseil municipal, le préfet désigne Léonard Bertin comme nouveau maire de Rueil. Ce notable, époux de l’héritière du château de Maurepas à Rueil et issu d’une famille de trésoriers royaux, a le profil type des fonctionnaires de l’empire : aisé et fidèle au pouvoir en place.
Le début de son mandat est agité par les évènements consécutifs par l’abdication en deux temps de Napoléon Ier. Le 29 mai 1814, alors que des soldats russes laissés par le Tsar Alexandre pour protéger La Malmaison campent à Rueil, Joséphine décède. L’enterrement de Joséphine constitue certainement un des évènements majeurs de l’histoire de Rueil avec ses officiels français et étrangers et cette foule trop nombreuse pour rentrer dans l’église.
Notable sous l’Empire, Léonard Bertin était ; notable sous la Restauration il restera. Le 23 octobre 1814, l’ensemble du conseil municipal prête serment au nouveau pouvoir. Le bref retour de Napoléon au pouvoir n’y changera rien et verra passer à Rueil cette fois… des soldats prussiens, qui laisseront un mauvais souvenir de leur passage et la municipalité au bord de la banqueroute.
Conforté dans son mandat, Léonard Bertin cherche toutefois dès 1816 à démissionner, peut être à cause de la lourdeur de la charge. Mais cela lui est refusé car on lui prête « une administration juste et paternelle ».

Mandat Jean Dherbès (1822-1835)

Jean Dherbès, Maire de Rueil
Déjà conseiller municipal, Jean Dherbès est désigné maire le 21 avril 1822. D’une famille de négociants, il a un parcours d’attachés ministériel sous l’Empire qui l’amènera parfois à l’étranger. C’est un Bonapartiste opportuniste qui réussira sous la Restauration : administrateur de la compagnie d’éclairage au gaz de Paris dont il est un des fondateurs, propriétaire un temps du château de Buzenval, il habite une belle propriété rue de Marly.
La loi électorale du 21 mai 1831 fait évoluer le processus de désignation ; à la marge toutefois puis le maire et ses adjoints sont toujours nommés par le roi ou son représentant le préfet : désormais, le conseil municipal est élu par un corps électoral censitaire pour six ans renouvelés par moitié tous les trois ans. Le processus électoral est singulier : le jour du vote, les électeurs sont appelés par le président du bureau de vote, prête un serment de fidélité au roi, prend un bulletin blanc qu’il complète et dépose dans l’urne. Les bulletins sont dépouillés après 3h de vote et ils sont brulés dans la foulée. Un PV est ensuite rédigé… mais on est encore loin d’une vraie élection démocratique : en 1834, sur 3540 habitants, seuls 227 hommes peuvent voter.
Les élections se suivent et se ressemblent : en septembre 1831, Jean Dherbès reste maire sous l’amicale pression du préfet qui note que « la commune de Rueil renferme une population turbulente ». En septembre 1834, rien ne change. Le 11 septembre 1835, Louis-Philippe dissout le conseil de Rueil et Jean Dherbès en profite pour démissionner.

Mandat Simon Rotanger (1836-1848)

Simon Rotanger, Maire de Rueil
L’élection de 1835 n’ayant rien donné, on revote en 1836. Le 7 février, Simon Rotanger est élu maire de Rueil. Simon Rotanger est un officier qui à fait une belle carrière d’officier sous la Révolution et sous l’Empire, comme capitaine du 17e régiment d’infanterie de ligne.
1837 est une date importante pour la vie de Rueil : le 24 août est en effet inaugurée la première ligne de chemin de fer passant par Rueil : Paris – Le Pecq initiant un mouvement qui sera amené à se développer : la transformation des villes périphériques de Paris en banlieues de la capitale.
Il est confirmé par l’élection de 1840 qui donne lieu à une certain dispersion des voix : 25 candidats pour 65 électeurs ! Cette même année et jusqu’en 1844, il sera le responsable de la loge maçonnique de Rueil Les Fidèles d’Hiram dans laquelle se retrouve les habitants actifs de Rueil.
En 1840, Simon Rotanger est inquiété par le pouvoir qui veut comprendre pourquoi il échange avec Louis-Napoléon Bonaparte (en fait, cet échange épistolaire est lié à un don du neveu de l’empereur déchu à la commune en souvenir de sa mère et de sa grand-mère). On sait aussi qu’il a assisté au passage des cendres de Napoléon en décembre 1840. Mais ces soupçons ne gênent en aucun cas sa carrière municipale. En 1843 puis en 1846, Simon Rotanger est confirmé dans ses fonctions. Le conseil municipal de Rueil, à l’origine populaire (artisans et cultivateurs étaient majoritaires à la Révolution) s’est embourgeoisé : on y croise encore des cultivateurs et des artisans mais rentiers, industriels et professions libérales complètent à égalité le conseil.
Il n’y a pas vraiment de campagne électorale pour ces élections. Les équipes municipales ne se renouvellent qu’à la marge et les maires ne le deviennent qu’après un long parcours qui les fait débuter comme simple conseiller avant de devenir adjoint. On retrouve souvent les mêmes noms de famille sur plusieurs génération, preuve d’une certaine continuité sociale.
A noter que sous le mandat de Simon Rotanger, les établissements scolaires se développent qu’il s’agisse de l’école communale ou d’écoles privées qui font de Rueil désormais bien desservi par le train un pôle local en matière d’enseignement secondaire de qualité. C’est à cette époque également que sont créées les ancêtres des écoles maternelles, les « salles d’asile ». A Rueil, elle verra le jour en 1843 grâce à des dons de Louis Napoléon Bonaparte, de la reine Marie-Christine d’Espagne et du Ministre de l’instruction publique.

Maire sous la Restauration...

Dans son livre sur l’histoire municipale de Rueil, Aline Fontvieille-Vojtovic synthétise le portrait somme toute lisse des maires de cette période : « Ces trois maires représentent trois types de notables qui ont sans problèmes assuré la continuité des institutions locales à travers plusieurs régimes politiques : un grand bourgeois d’Ancien Régime ayant survécu à la Révolution (Bertin), une personnalité originale sachant saisir les opportunités (Dherbès), un militaire d’Empire passant une paisible retraite au service de ses concitoyens (Rotanger). Aucun d’eux n’a eu d’ambition nationale (…). Tous ont en commun modération et sens pratique. »

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